Concertation publique préalable sur le projet d’extension et d’adaptation de la station d’épuration Maera

Communiqué de presse du vendredi 16 mars 2018,

La station d’épuration Maera, conçue et exploitée par Veolia, traite actuellement les eaux usées de 385000 habitants, soit 84 % de la population de la métropole de Montpellier. Depuis sa mise en service, Maera souffre de problèmes récurrents de fonctionnement : rejet des eaux usées non traitées dans le Lez en cas de fortes pluies, forte odeur en été affectant les riverains, gestion des boues résiduelles coûteuse et peu écologique, pollutions accidentelles des eaux de baignade de Palavas… Par ailleurs, la métropole de Montpellier a décidé d’arrêter la station d’épuration de Castries et a entrepris de raccorder à Maera les eaux usées de cette commune. Afin d’éviter que ce raccordement n’aggrave les problèmes de fonctionnement de Maera, la métropole de Montpellier a aussi décidé d’effectuer des travaux d’extension et d’adaptation de la station.

Mais de la même manière que le raccordement à Maera des eaux usées de Castries est en cours de réalisation sans qu’il y ait eu consultation de la population, le projet d’extension et d’adaptation de Maera, d’un coût estimé à plus de 100 millions d’euros et à fort impact environnemental, n’avait pas donné lieu à l’information et à la consultation de la population. C’est pour cette raison que Attac Montpellier, CIDES34, Eau Secours 34 et France Nature Environnement Languedoc Roussillon ont usé de leur droit d’initiative en demandant au préfet de l’Hérault que soit organisée une concertation publique préalable pour ce projet. Celle-ci se déroulera du 7 mars au 6 avril sous la responsabilité de la métropole de Montpellier. Les habitants des 19 communes impactées par le projet peuvent d’ores et déjà consulter le dossier de présentation du projet en mairie ou sur le site web de la métropole et soumettre des commentaires dans un régistre prévu à cet effet. De plus, une réunion publique se tiendra le 28 mars à 15h à l’hôtel de la métropole. Malgré le manque d’information sur cette concertation par la métropole de Montpellier, nous espérons une forte participation des adhérents de nos associations comme du reste de la population.

Documents

Demande au préfet de l’Hérault datée du 24 décembre 2017
Décision du préfet de l’Hérault datée du 24 janvier 2018
Annonce de la concertation par la métropole
Dossier de présentation du projet

Signataires

logos

La Commission européenne déçoit encore une fois les citoyens qui ont soutenu l’Initiative pour le droit à l’eau

Bruxelles, le 31 janvier 2018

Aujourd’hui, les défenseurs européens de l’eau constatent que la proposition d’une nouvelle directive sur l’eau potable qui a fuité est décevante et ne répond pas aux attentes des citoyens et des organisations qui ont soutenu la première Initiative citoyenne européenne (ICE) sur le droit à l’eau.

Elisabetta Cangelosi, membre de l’European Water Movement, déclare: “Nous avons attendu une réponse pendant cinq ans et le résultat ne peut être plus décevant. Bien que nous saluons la timide tentative de la Commission d’inclure des dispositions sur l’accès universel à l’eau et l’accent mis sur les minorités et les groupes vulnérables, ce texte n’a rien à voir avec le droit à l’eau reconnu par les Nations Unies et exigé par les citoyens”.

Le droit humain à l’eau tel que défini par les Nations Unies implique que l’eau et l’assainissement doivent être physiquement accessibles, sûrs, acceptables, suffisants et abordables. La refonte de la directive sur l’eau potable n’a porté que sur les trois premiers aspects.

Lire la suite sur le site de l’European Water Movement

Le recul du trait de côte en Méditerranée

Résumé d’une présentation par Eau Secours 34 donnée lors de la journée de formation du réseau eau de FNE Languedoc Roussillon, le 24 novembre 2017.

Qu’est-ce que le trait de côte ?

Il y a eu pendant longtemps plusieurs définitions du trait de côte, ce qui posait problème pour quantifier son évolution dans le temps. Mais nous avons maintenant une seule définition au niveau européen, depuis l’adoption en 2008 de la directive cadre de la stratégie pour le milieu marin.

Comme le montre le schéma ci-dessous, le trait de côte est la limite entre la partie terrestre du littoral (y compris les lagunes) et la partie marine du littoral. Le trait de côte concerne donc à la fois la directive cadre sur l’eau (DCE) et la directive cadre de la stratégie pour le milieu marin (DSM), mais aussi quelques autres directives comme la directive habitat par exemple.

 

En France, la directive cadre de la stratégie pour le milieu marin a été transposée par un décret en 2012, complété en 2014 par une circulaire mettant en cohérence la directive cadre sur l’eau et la directive cadre de la stratégie pour le milieu marin. Il en résulte la production de plusieurs documents, la stratégie nationale pour la mer et le littoral, les plans d’action pour le milieu marin, les plans de prévention des risques littoraux.

Le trait de côte n’est pas fixé une fois pour toute; il évolue en fonction du temps. Plusieurs agents contribuent à son évolution, des agents naturels et des agents anthropiques.

Parmi les agents naturels, on trouve des agents marins comme la houle, la marée, les courants marins et la variation du niveau de la mer, et des agents géomorphologiques comme le type de côte rocheuse ou sableuse, la disponibilité et la composition des sédiments.

Parmi les agents anthropiques, on trouve des ouvrages de protection comme les épis transversaux, les digues et les enrochements longitudinaux, et des ouvrages affectant le transport des sédiments fluviaux comme les barrages.

Il en découle selon l’endroit un recul du trait de côte par érosion et montée du niveau de la mer, ou une avancée du trait de côte par engraissement sédimentaire.

L’érosion côtière en méditerranée

Les côtes européennes subissent toutes un phénomène d’érosion. Cette érosion est forte, voire très forte sur une grande partie de la côte méditerranéenne.

Le littoral méditerranéen français est constitué de 51 % de côtes rocheuses et 32 % de plages. Un recul du trait de côte est observé sur 11 % du linéaire côtier et 36 % des plages. Le Languedoc-Roussillon est particulièrement affecté par le recul du trait de côte; 22% est en recul pour 14% en région PACA.

Un indicateur national de l’érosion côtière a été réalisé par le CEREMA pour le ministère de l’environnement. Il décrit l’évolution du trait de côte de 1937 à 2011. Voici un extrait de cet indicateur. L’avancée du trait de côte est en vert, le recul en orange et les ouvrages de protection sont représentés en rouge.

Nous voyons en certains endroits un recul du trait de côte qui peut atteindre jusqu’à 3 m par an.

Quelles stratégies face au recul du trait de côte ?

Il y a 4 stratégies qui ne sont pas exclusives les unes des autres:

  1. Ne rien faire mais se contenter de faire un suivi du recul du trait de côte.
  2. Mettre en place des protections douces utilisant des processus naturels comme l’apport de sédiments et la végétalisation; mais ce sont des solutions temporaires.
  3. Mettre en place des protections dures sous la forme d’ouvrages de génie civil comme les digues; mais ce sont des solutions à la fois temporaires et coûteuses.
  4. Faire du recul stratégique en déplaçant les enjeux économique et humains à l’intérieur des terres; c’est malheureusement souvent l’inverse qui est fait dans les projets d’aménagement du littoral.

Certains ouvrages de protection se sont révélés avoir des impacts négatifs sur le trait de côte. C’est le cas des épis transversaux et des enrochements longitudinaux qui augmentent l’érosion de part et d’autre de l’ouvrage.

Les 2 photos ci-dessous de la côte à Frontignan illustrent ces impacts négatifs.

Par contre, un autre type d’ouvrage de protection, l’atténuateur de houle, s’est révélé particulièrement efficace pour lutter contre l’érosion des plages.

En hiver, les houles de tempête, qui peuvent atteindre jusqu’à 3,5 m en Méditerranée, enlèvent une partie du sable. Apporter du sable juste avant la saison estivale est coûteux et repousse le problème à l’année suivante, à la différence de l’atténuateur de houle.

L’atténuateur de houle est constitué d’un tube en géo-textile rempli de sable et immergé longitudinalement à la côte. L’atténuateur de houle casse l’énergie des houles de tempête. Ce dispositif mis en place au niveau du Lido de Sète a stoppé l’érosion et a même permis une avancée de 12 m du trait de côte.

L’apport de sédiments

Le facteur principal du recul du trait de côte en Méditerranée est la réduction de l’apport de sédiments par les fleuves côtiers : Pô, Rhône, Ebre, Nil. C’est l’aménagement de ces fleuves, en particulier la construction de barrages, écluses, centrales hydroélectriques au fil de l’eau qui entraine la réduction de l’apport de sédiment.

Dans le cas du Rhône, l’apport actuel de sédiments ne représente que quelques % de l’apport « naturel » d’avant l’aménagement du Rhône et de la Durance. Le courant marin liguro-provençal-catalan ne dépose plus suffisamment de sédiments du delta du Rhône jusqu’aux Pyrénées-Orientales.

Et la situation va s’aggraver !

Le nouveau plan de gestion du bassin de l’Ebre par la commission hydrographique de l’Ebre prévoit de construire 56 nouveaux barrages, ce qui va réduire de manière drastique le débit et l’apport de sédiments au niveau du delta.

l’Ethiopie a démarré la construction du gigantesque barrage réservoir Grand Renaissance sur le Nil bleu, ce qui va réduire encore plus les apports de sédiments et d’eau pour le delta.

L’extraction de gravier, galets et sable en amont des barrages pour la construction d’infrastructures et d’habitations continue de plus belle.

Le débit moyen des fleuves diminue sous l’effet du réchauffement climatique. En 2100, le Rhône verra très probablement son débit d’étiage diminué de 30 % et son débit moyen divisé par 3.

Le 7 février 2016, la Plateforme de Défense de l’Ebre réunissait à Amposta 50000 personnes pour manifester contre les projets de barrages qui vont conduire à la disparition du delta de l’Ebre, des activités économiques qu’il génère et du cadre de vie de la population locale.

L’élévation du niveau de la mer

Après plusieurs siècles de stabilité, le niveau de la mer s’est remis à monter au début du XIXème siècle sous l’effet du réchauffement climatique lié aux activités humaines. Comment ? Par dilatation thermique de l’eau et fonte des glaciers, neiges et calottes glaciaires ; en Méditerranée, c’est surtout la dilatation thermique qui est responsable de l’élévation du niveau de la mer.

Au XXème siècle, le niveau des océans a monté de 17 cm avec une accélération de 1992 à 2015, puisque nous sommes actuellement sur une base de 3,6 mm/an.

L’élévation n’est pas uniforme et elle est plus faible en Méditerranée que dans l’Atlantique. Néanmoins, les experts tablent actuellement sur une élévation de plus d’un mètre à l’horizon 2100.

Comme tous les grands deltas méditerranéens, le delta du Rhône subit un recul du trait de côte (67 % du linéaire est concerné) et un affaissement par manque d’apports de sédiments.

Une grande partie du delta est à moins d’un mètre au dessus du niveau de la mer. Dans un scénario catastrophe, bien que tout à fait plausible, cette partie du delta pourrait disparaître.

Liens utiles

Directive cadre de la stratégie pour le milieu marin
Indicateur national de l’érosion côtière – Languedoc-Roussillon
Indicateur national de l’érosion côtière – PACA
Direction interrégionale de la mer Méditerranée

Le droit d’accès à l’eau et à l’assainissement dans le monde

Vidéo de la conférence-débat organisée par le comité local Attac avec le soutien de Eau Secours 34, à Montpellier le mardi 20 juin 2017 sur “Le droit d’accès à l’eau et à l’assainissement et sa mise en œuvre dans le monde”, avec Sylvie Paquerot, professeure en sciences politiques de l’université d’Ottawa.

Sylvie Paquerot étudie depuis longtemps les enjeux politiques du droit d’accès à l’eau et à l’assainissement dans le monde. Actuellement, elle s’intéresse plus particulièrement aux luttes de communautés en Amérique du Sud et en Afrique contre les grandes entreprises minières canadiennes qui affectent leur droit d’accès à l’eau.

Après une brève introduction sur les enjeux politiques et les luttes sociales pour la reconnaissance de ce droit humain dans le monde, Sylvie Paquerot a répondu aux questions du comité local Attac, de Eau Secours 34 et du public. Cet échange a permis de faire un parallèle avec la situation en Europe et même à Montpellier et donc de décliner la reconnaissance du droit d’accès à l’eau et à l’assainissement du global au local.

 

Le transfert de la compétence GEMAPI, une malfaçon législative de plus

Le transfert de la compétence GEMAPI (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) fait partie de la réforme territoriale portée par les lois MAPTAM (Modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) de 2014 et NOTRe (Nouvelle organisation territoriale de la République) de 2015. Cette réforme territoriale, voulue par les gouvernements de droite et de gauche qui se sont succédé depuis près de dix ans, se propose de simplifier et rationaliser la décentralisation à la française. Cependant, les délais très courts d’application de la réforme et une prise en compte bâclée de l’histoire et des spécificités des territoires impactés font courir le risque que l’exercice des compétences par les collectivités locales et territoriales soit gravement perturbé pendant les quatre ou cinq années à venir.

Qu’est-ce que la compétence GEMAPI ?

La compétence GEMAPI comprend l’aménagement d’un bassin ou sous-bassin versant (milieux aquatiques), l’entretien et l’aménagement des cours d’eau, canaux, plans d’eau, berges (milieux aquatiques mais aussi prévention des inondations), la défense contre les inondations et la mer (prévention des inondations), la protection et restauration des écosystèmes aquatiques (milieux aquatiques).

Le transfert de la compétence GEMAPI doit se faire au plus tard le 1er janvier 2018, de l’État, des départements et des communes vers les Établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI à FP), c’est-à-dire les intercommunalités de types métropoles, communautés urbaines, communautés d’agglomération, communautés de communes. En Île-de-France, le transfert de la compétence doit se faire vers la Métropole du Grand Paris, un EPCI à statut particulier et à fiscalité propre créé le 1 janvier 2016 et constitué de 131 communes dont Paris.

Le transfert de la compétence GEMAPI ne va chambouler ni la gestion des milieux aquatiques mise en place avec la transposition de la Directive-cadre sur l’eau en 2006 (Loi sur l’eau et les milieux aquatiques), ni la gestion du risque d’inondation mise en place avec la transposition de la Directive Inondations en 2010 (Loi Grenelle II). Mais il va y avoir une redistribution des compétences et des responsabilités entre les différents acteurs. Les effets en seront d’autant plus difficiles à prévoir que nous sommes déjà face à un monstre bureaucratique et technocratique d’une grande complexité.

Lire la suite sur le site web de la revue Les possibles du conseil scientifique d’Attac

La Communauté d’Agglomération de Montpellier a triché, l’association Eau Secours 34 condamnée !

Montpellier, 13 avril 2016

Les conditions anti-démocratiques dans lesquelles le Conseil d’Agglomération a décidé le 25 juillet 2013 de laisser la gestion de l’eau et de l’assainissement dans les mains d’entreprises privées sous la forme de 4 délégations de service public (DSP) ont amené Eau Secours 34 et des usagers de l’eau à déposer une requête en annulation de cette décision auprès du tribunal administratif.

Deux ans après notre requête en annulation – le principe d’une DSP pour la gestion de l’eau ayant été abandonné entre-temps au profit d’une régie publique –, le tribunal administratif vient de rejeter globalement tous nos arguments.

La requête en annulation de Eau Secours 34 portait principalement sur les points suivants :
1- Annonce de la décision de nouvelles DSP par le président de la CAM avant le vote du Conseil d’Agglomération sur ce sujet.
2- Impossibilité matérielle, pour les élus communautaires, à voter en toute connaissance de cause, ces derniers ayant reçu une masse considérable de documents impossible à analyser en juste 5 jours.
3- Insuffisance d’information des élus communautaires et information fondée sur des documents non fournis en séance, notamment le bilan financier des 25 ans de gestion de l’eau par Veolia.
4- Présentation par le président de la CAM et le rapporteur, vice président en charge de la commission eau et assainissement, d’informations erronées et invérifiables en séance, ayant eu une incidence sur le vote, telles que le prix de l’eau de régies publiques comme celle de Paris.
5- Injures publiques, dénigrement, pressions par le rapporteur et le président de la CAM ayant porté atteinte à la sérénité des débats et ayant eu une incidence sur le vote, comme par exemple la comparaison par le rapporteur des élus communautaires pro-régie à des « collaborateurs de l’Allemagne nazie ».
6- Atteinte au caractère public de la séance du Conseil d’Agglomération du 25 juillet 2013, la société civile n’ayant pu accéder à la salle bourrée préalablement par du personnel de la CAM et des bureaux d’étude.

Pour avoir dénoncé la parodie de démocratie de la séance du Conseil d’Agglomération du 25 juillet 2013, Eau Secours 34 – une association refusant toute forme de subvention de la part des collectivités locales/territoriales et des entreprises privées pour préserver son indépendance – s’est vue de plus condamnée à verser 800 euros à Montpellier Méditerranée Métropole. Cherchez l’erreur !

Chacun-e pourra trouver sur le site de Eau Secours 34 :
– la synthèse de la requête en annulation
– le jugement du tribunal administratif

Renversement de situation

La Communauté d’Agglomération de Montpellier (CAM) constituée de 31 communes exerce la compétence pour l’assainissement depuis 2001 et celle pour l’eau potable depuis 2010. Plusieurs contrats de DSP (Délégation de Service Public) pour l’eau potable et l’assainissement expirant fin 2014, la CAM devait donc choisir entre continuer en gestion privée avec de nouveaux contrats de DSP ou opter pour la gestion publique en créant des régies publiques ou des sociétés publiques locales.

Le 25 juillet 2013, le conseil communautaire votait à une forte majorité la mise en œuvre d’une procédure dite « Loi Sapin ». Celle-ci présente la particularité de ne retenir que le principe de la préparation réglementaire d’une nouvelle DSP succédant à celle déjà en cours, le choix de la gestion publique ne pouvant intervenir dans ce cadre que de manière marginale. La délibération adoptée prévoyait donc de lancer, sur proposition de son président PS, Jean-Pierre Moure, et conformément à la réglementation (Code Général des Collectivités Territoriales et Loi Sapin), une consultation sous forme d’appels d’offre pour une DSP eau potable sur 13 communes, dont Montpellier, ainsi que trois DSP assainissement pour l’ensemble des communes de l’agglomération[1]. Seuls quelques conseillers votaient contre dont René Revol, maire de Grabels, et Philippe Saurel, conseiller municipal de Montpellier. Dans la foulée et comme l’impose la Loi Sapin, la CAM publiait les appels d’offres pour les quatre DSP d’une durée de 7 ans dans un journal officiel, en l’occurrence celui de l’Union Européenne.

Eau Secours 34 décidait alors, d’une part de déposer un recours contentieux auprès du tribunal administratif de Montpellier[2], et d’autre part d’interpeller les candidats aux élections municipales en leur demandant de se positionner sur le choix d’une gestion publique ou privée des services eau potable et assainissement sur le périmètre de l’agglomération. Grâce à une forte communication de Eau Secours 34 dans les médias associée à un travail d’information de la population, la question public-privé des services eau potable et assainissement est ainsi devenue progressivement le thème principal de la campagne électorale. Jean-Pierre Moure, candidat PS à la mairie de Montpellier, était donné largement vainqueur par les sondages en début de campagne. Mis en difficulté par Eau Secours 34 sur son choix de la gestion privée, Jean-Pierre Moure a progressivement perdu du terrain au profit de Philippe Saurel, dissident PS, qui s’était positionné clairement pour la gestion publique.

Finalement, Philippe Saurel était élu maire de Montpellier et devenait président de la CAM le 15 avril 2014. Le 22 avril 2014, René Revol était élu vice-président de la CAM en charge de l’eau et de l’assainissement et prenait la présidence de la commission Eau et Assainissement. Comme il s’y était engagé pendant la campagne électorale, Philippe Saurel interrompait la procédure Loi Sapin pour la DSP eau potable[3] avant l’ouverture des enveloppes (propositions des entreprises privées postulant à la DSP) au motif de l’intérêt général. Le 7 mai 2014, le nouveau conseil communautaire votait à une très large majorité la proposition par Philippe Saurel d’une régie publique pour le service eau potable des 13 communes. Il n’est pas sans intérêt de constater que la quasi-totalité des élus présents dans l’ancien et le nouveau conseil communautaire ont voté pour la DSP puis pour la régie publique à quelques mois d’intervalle.

Quelles leçons générales en tirer qui puissent servir ailleurs aux collectifs et associations luttant pour un retour en gestion publique ? Tout d’abord, il faut toujours garder à l’esprit que la législation française accorde au seul maire ou désormais président de l’EPCI à fiscalité propre[4] le plein pouvoir de décision concernant, d’une part le mode de gestion des services publics locaux de l’eau et de l’assainissement et, d’autre part l’entreprise privée retenue comme délégataire à l’issue de la procédure « Loi Sapin ». Le maire ou président de l’EPCI n’a pas de compte à rendre à la société civile et aux usagers sur ses choix qui sont faits en vertu d’un très vieux principe juridique, « l’intuitae personae »[5]. Pour que les associations et collectifs puissent néanmoins peser sur la prise de décision, il leur faut connaître l’agenda politique et avoir un minimum de maîtrise technique des différents modes de gestion ainsi que du fonctionnement d’un service public local de l’eau et de l’assainissement. Même lorsque c’est le cas, leur poids sera en général beaucoup plus faible que celui du service Eau et Assainissement de la collectivité locale ou que celui de Veolia, Suez et compagnie. Eau Secours 34 a bénéficié de la proximité des élections municipales et d’un contexte politique local très particulier. Il n’est pas dit que Philippe Saurel aurait interrompu la procédure Loi Sapin et décidé du passage en régie publique du service eau potable s’il avait eu l’investiture socialiste pour les élections municipales de Montpellier.

NOTES

[1] Cette précision est importante: toute collectivité qui a la ferme volonté de revenir en gestion publique peut parfaitement, avant la fin d’un contrat de DSP confié à une entreprise privée, faire l’économie d’un appel à la concurrence pour une nouvelle DSP. Elle peut engager directement la création d’une régie publique ou d’une société publique locale. Cela permet d’éviter le débat toujours biaisé, qui conduit dans l’écrasante majorité des cas, en raison même des impératifs et du calendrier de mise en œuvre de la procédure « Loi Sapin », à la signature d’un nouveau contrat de DSP avec une entreprise privée.

[2] Le recours contentieux déposé le 29 janvier 2014 par Eau Secours 34 et plusieurs usagers porte principalement sur le défaut d’information des conseillers communautaires avant la séance du 25 juillet 2013 et sur le caractère trompeur des informations communiquées par le rapporteur. Le 24 novembre 2015, les avocats de Montpellier Méditerranée Métropole (le 1er janvier 2015, la communauté d’agglomération s’est transformée en métropole) envoyaient un mémoire en défense réclamant 3000 euros de dommages et intérêts. Eau Secours 34 est en train de rédiger une réponse aux avocats avant que le recours soit jugé dans les semaines qui viennent.

[3] L’assainissement reste en gestion privée, ce que Eau Secours 34 n’a pas manqué de dénoncer. Deux DSP ont été attribuées à Veolia et une à Alteau.

[4] La loi NOTRe du 7 août 2015 portant Nouvelle Organisation Territoriale de la République a décidé le transfert des compétences eau et assainissement des communes aux Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) à fiscalité propre (Communauté de Communes, Communauté d’Agglomération, Métropoles…). Optionnel le 1er janvier 2018, ce transfert est obligatoire au 1er janvier 2020. Parallèlement, les compétences eau et assainissement exercées par des milliers de syndicats intercommunaux vont également être transférées aux EPCI à l’horizon 2020, dans le cadre de l’élaboration des nouveaux Schémas Départementaux de Coopération Intercommunale, actuellement mis en œuvre dans chaque département par les Préfets, et qui devront être finalisés avent le mois de juin 2016.

[5] « L’intuitae personae » signifie que la décision est prise en fonction de la conviction personnelle sans obligation de tenir compte des critères techniques et économiques.